PROPOSITION #4

L’espace d’accueil de l’UT : premier lieu du travail social

Lors du Forum Ouvert « En 2015, quelles actions et quels projets souhaitez-vous expérimenter au regard des droits culturels ? » organisé dans le cadre de la démarche Paideia, les 26 et 27 novembre 2014 à la Condition Publique de Roubaix, il a été proposé de « Penser le projet de service (UTPAS) avec les droits culturels ». Les 1ères études de cas réalisées ont montré la nécessité de concentrer le travail sur les conditions d’accueil en UTPAS.
Dès lors, un groupe constitué d’acteurs sociaux et culturels du Département s’est organisé pour réaliser de nouvelles études de cas portant plus spécifiquement sur les conditions d’accueil en UTPAS. Les enseignements tirés de l’ensemble des cas analysés au regard des droits culturels ont permis d’élaborer deux propositions : l’une portant sur l’espace d’accueil en UTPAS et l’autre portant sur une conception partagée de la mission d’accueil entre les membres d’une équipe. La notion d’accueil est comprise dans une acception large et met à jour la complexité de l’accueil au sein d’institutions aux missions de service public.

« Pouvoir sortir des cadres familiers dans lesquels on est situé semble ainsi une condition de l’hospitalité. Il faut alors non seulement accepter que soi-même puisse en venir à être aidé par un autre mais aussi que soi-même, de ce point de vue, ne forme pas un monde complet. […] Accueillir ne signifie pas simplement prendre soin d’une vie fragilisée […] Je n’accueille jamais une subjectivité neutralisée mais toujours des histoires, récits, des voix discordantes. Ainsi le soi de l’accueillant n’est-il jamais assuré de garder sa voix intacte quand il fait entrer l’autre voix chez lui. C’est cette porosité des frontières qui donne sens, par-delà les frontières établies, à la possibilité de l’hospitalité. La violence qui sous-tend l’inhospitalité est dès lors volonté de maintenir les frontières du soi. […] De telle sorte que c’est bien notre incapacité à sortir de nos frontières qui engendre l’altérisation de certains sujets d’où résulte l’incapacité à envisager le moindre échange entre les vies ainsi discréditées et celles qui se sont reconnues comme des vies accréditées. » [Le Blanc, 2011]

 

« Avoir une vie sociale, c’est aussi pouvoir circuler dans de multiples lieux. Le recours au travail social implique souvent de circuler dans de multiples lieux, mais cela résonne plus souvent comme un parcours du combattant qui peut autant laisser à la périphérie de la société que permettre de se redécouvrir une place en son sein. Tout est bien souvent question de seuils à franchir. De nombreux cas d’école abordent la question de la mobilité des personnes. Devoir pousser la porte de certaines structures ou venir à un rendez-vous sont des actes qui relèvent parfois d’une épreuve. Les obstacles peuvent être symboliques (je n’ai pas conscience de ce qu’implique mon absence ou ma présence), physiques (je n’ai pas de moyens de transport), fonctionnelles (je ne peux pas faire garder mes enfants). L’accueil des personnes prend ainsi une dimension centrale : en termes de disponibilité, d’écoute, de respect mutuel, de scénographie des espaces, d’accès aux services, de circulation d’informations, d’orientations possibles, etc. L’accueil devient un « métier » et non plus une seule « fonction ». La question des ressources humaines et de la formation est alors posée » [Publication Paideia, 2015, p. 81]

 

DÉPLOIEMENT DE LA PROPOSITION

ENJEUX

Garantir l’accès au service public dans le respect des droits des personnes
  • Accueillir toute personne sans discrimination dans un lieu où la sûreté de tous est garantie (droit de choisir et de voir respecter son identité culturelle, droit à la sûreté de sa personne)
Favoriser le lien social et les relations de confiance réciproque
  • Concevoir l’espace d’accueil comme un lieu d’échanges interpersonnels où le respect de la vie privée et des règles de confidentialité sont garantis (droit de communiquer et partager avec autrui dans le respect de l’identité culturelle de chacune des personnes en relation)
Valoriser les ressources des accueillants et des accueillis
  • Valoriser les ressources des personnes : concevoir l’espace d’accueil comme un lieu où il est possible de comprendre son environnement et de développer ses capacités à y prendre part (droit à l’information appropriée, droit de connaître sa propre culture ainsi que d’autres cultures et de participer à la vie culturelle)
Valoriser le métier d’agent d’accueil
  • Valoriser et former le personnel d’accueil : concevoir l’espace d’accueil comme un lieu où œuvre au quotidien un personnel qualifié contribuant à la qualité des pratiques d’accueil au sein des institutions comme à celle du travail social (droit à la reconnaissance des métiers et des savoirs, à la formation, droit de participer à la vie culturelle d’une institution)

« Ce qui nous intéresse avant tout, c’est la diversité humaine. Comment administrer en respectant cette diversité ? En en faisant un élément fondamental du corpus du service public, et non pas en cherchant à la canaliser dans un système où administrer se limiterait à multiplier les systèmes « désincarnés », et des répondeurs du type « Vous êtes une personne âgée, faites le 1, une personne handicapée, faites le 2, etc. ». Ce n’est pas comme ça que les politiques ou les fonctionnaires des Départements envisagent leur fonction ». [L’Herminier, 2015, p. 14]

 

« Le service public est incarné sur des lieux d’accueil par des agents dont la mission est de recevoir les habitants et de les orienter dans leurs parcours administratifs. L’information disponible auprès de ces agents, dans un contexte de complexification des dispositifs et d’enchevêtrement institutionnel, constitue leur matière première essentielle » [De Jésus, 2016, p. 54]

 

« L’enjeu autour de la valeur de l’information délivrée par les agents d’accueil a été le premier point d’entrée à travers les droits culturels pour proposer finalement une analyse du métier d’agent d’accueil. Celle-ci, alimentée par des témoignages d’agents du Département du Territoire de Belfort, a révélé le rôle stratégique de la fonction accueil, le traitement inapproprié qui en est parfois fait et la promesse, en termes d’innovation, que constituerait une fonction accueil affirmée, développée dans une organisation administrative intégrée. L’analyse à travers les droits culturels a permis en premier lieu de traduire le décalage important existant aujourd’hui entre la réalité de ce qui compose l’accueil (fonction) et les moyens dévolus aux agents pour assurer leurs missions (métier/poste). Une extrême tension est en effet constatée entre la capacité des agents à agir (profils, formation, conditions matérielles de l’accueil, connexion avec l’environnement plus ou moins proche de travail) et les exigences imposées par la réalité des missions assurées. Elle résulte d’une méconnaissance de la complexité des processus en jeu dans la fonction accueil ». [De Jésus, 2016, p. 54]

 

PROBLÉMATIQUES

Manque de moyens humains et matériels face au nombre de personnes accueillies
  • Difficultés face au nombre de personnes accueillies dans un même espace: tension entre l’accueil de toutes les personnes sans discrimination et l’attention qui doit être portée à la singularité de chacune d’entre elles pour rendre effectives les valeurs d’égalité du service public. Comment garantir l’accueil des personnes dans des conditions correspondant aux valeurs portées par les acteurs du service public et celles énoncées dans les droits humains ?
  • Complexité des conditions de travail du personnel d’accueil: l’accueil des personnes est un acte complexe qui nécessite de se former en continu et requiert une reconnaissance appuyée par l’institution. Tension entre la recherche d’une économie soutenable dans l’organisation des services publics et la nécessité d’assurer un accueil de qualité avec un personnel employé spécifiquement pour cette mission.
  • Épreuve du temps d’attente : tension entre vouloir réduire le temps d’attente des personnes dans les espaces d’accueil et le fait que l’accueil des personnes nécessite un temps propre, à valoriser en tant que tel dans les différents services et auprès des personnes accueillies.
Complexité et pluralité des situations des personnes accueillies
  • Épreuve des locaux inadaptés et inappropriés : tension entre la conception d’un espace commun à de multiples personnes et la nécessité de l’organiser pour que chacune d’elles y trouve sa place dans le respect des règles de confidentialité. Comment le service public est-il mis à l’épreuve de son adaptabilité ?
  • Difficultés de conciliation entre la demande de la personne et l’offre du service public au regard de leurs références culturelles : tension entre le partage d’une culture commune au sein des institutions aux missions de service public et la prise en compte de la diversité des références culturelles des personnes impliquées. Comment l’acte d’accueillir au sein de ces institutions met-il chaque partie-prenante à l’épreuve des accordements ?
Complexité et pluralité des dispositifs de service public
  • Tensions face aux missions d’information et d’orientation des personnes dans un délai restreint : tension entre la multiplicité d’informations que le personnel d’accueil a pour mission de recueillir, rechercher et transmettre à une diversité de personnes au même moment et le temps nécessaire à la transmission d’informations appropriées.
Multiples formes de violence : institutionnelles et relationnelles
  • Épreuve de l’effet miroir des formes de violence : tension entre la rigueur que requièrent les institutions aux missions de service public et les marges de manœuvre nécessaires au personnel d’accueil, en première ligne des difficultés générées par l’engorgement des services, les situations complexes des personnes accueillies, les multiples formes de violences institutionnelles (manque de disponibilité, incohérences et lourdeur du système administratif).

Penser le lien entre la conception de l’espace et la place que chacun peut y trouver
« Les référentiels de construction des collèges ont très peu évolué au fil des ans, défendant une vision plutôt individualiste et disciplinaire qu’une vision transversale avec des espaces partagés. Le collège fonctionne seulement en période scolaire alors que les locaux pourraient profiter à d’autres publics relevant de la compétence du Département s’ils étaient conçus à cet effet et si cette ouverture était concertée et acceptée par la communauté éducative. […] Il est difficile de faire un lien entre l’environnement physique et la réussite des élèves mais un bâtiment bien conçu et bien entretenu dans lequel les enseignants et les élèves se sentent bien peut jouer favorablement sur les résultats des élèves. Le collège serait un lieu de flux qui peut favoriser les échanges entre les adultes et les élèves. Il s’agirait de développer l’autonomie, la prise de responsabilité, la citoyenneté. Il est important d’accorder une attention particulière aux espaces communs qui sont des espaces de socialisation et d’échanges » [Berne et L’Herminier, 2016, p.106]

Travailler la conception d’un lieu public, l’exemple d’un collège en Ardèche
« L’accompagnement du département dans les nouveaux usages du collège a conduit à organiser plusieurs résidences en immersion dans deux collèges ardéchois. Dès le premier rendez-vous, il était important de démarrer sur ce principe partenarial. Mais ce qui nous intéresse surtout dans cette approche immersive, c’est d’aller voir comment les gens travaillent. Une grande diversité de cultures professionnelles cohabite au sein du collège. On ne pouvait interroger les gens de but en blanc sur leur vision du collège du futur. Il fallait d’abord qu’ils nous racontent comme ils le vivent aujourd’hui. Si on veut travailler sur la rénovation du collège, il faut qu’on parle de l’existant. La participation à la vie culturelle du collège, est pour les élèves le temps hors classe. Pour ces explorations, nous avons procédé avec plusieurs outils du design comme le photo-langage pour faire parler les collégiens. Cela a notamment fait émerger des constats inattendus […]. L’idée était dès lors de s’interroger sur la manière de concevoir des places publiques dans le collège […]. Concevoir des endroits où les élèves se sentent bien et qui soient conçus avec eux. […] On pense naturellement « professeurs, élèves et administration pédagogique », mais il a effectivement de nombreux autres protagonistes dans le collège. […] Habituellement, les projets de restructuration s’intéressent plutôt aux aspects de l’architecture pédagogique et beaucoup moins aux ateliers des agents d’entretien par exemple, qui sont pourtant un maillon essentiel pour la gestion du collège. […] La coopération entre l’éducation nationale et les collectivités locales est encore pensée comme « la tête et les jambes ». […] C’est comme si on considérait que le bâtiment n’a pas d’importance et que ce ne sont que les contenus pédagogiques qui priment. On ne peut plus séparer les choses de cette manière ». [Thévenet, 2016, p. 107]

« On observe tout d’abord des attentes du public de plus en plus diversifiées et une sociologie d’usagers de plus en plus difficiles à satisfaire. La complexité des questionnements des personnes accueillies reflète la complexité d’un paysage institutionnel dans lequel les « clients » manquent de repères. Les agents d’accueil doivent bien souvent développer une aptitude à dépasser les cloisonnements institutionnels imposés par leur poste pour être en capacité d’apporter des éléments de réponse individualisés. On est loin de l’image stéréotypée de l’hôtesse d’accueil décérébrée qui perdure parfois dans les représentations collectives ! Un autre élément de la complexité du métier d’agent d’accueil qui paraît être occulté par l’administration est la question de l’appréhension de la diversité des publics alors que des situations spécifiques (personnes ne parlant pas le français ou ne le lisant pas, dimension interculturelle de l’accueil, accueil de personnes fragilisées ou en situation de handicap) appellent des aptitudes et une prise en charge particulière. Le besoin d’outils et les attentes des agents d’accueil, appuyés par les encadrants, en matière d’adaptation aux diverses situations d’accueil en présence sont largement exprimés ; il en va de la capacité de l’institution à respecter l’identité culturelle des personnes et à accompagner pour ce faire les agents qui la représentent au quotidien. Le métier d’agent d’accueil reste déprécié dans nos organisations classiques. Il en résulte une gestion de carrière inadéquate et une mésestime pour les besoins matériels et immatériels parfois exprimés. Ce manque d’intérêt se traduit par une politique de recrutement inefficace, un manque de préparation des agents, une quasi-inexistence de formation, un isolement des agents sur un cœur de mission (la relation interpersonnelle) et un déficit en termes de connexion sur l’organisation interne comme sur son environnement externe. Il est d’ailleurs frappant de constater que des stratégies de contournement sont parfois développées par ces agents sur qui repose la responsabilité de traduire l’action publique voire parfois de rendre intelligibles les processus administratifs ! Ces difficultés sont renforcées par le malaise ressenti au regard de la violence symbolique exercée par l’administration dans ses relations avec ses « administrés » et le sentiment de ne pas respecter l’identité, l’intimité ou la dignité des personnes : matraquage de questions nécessaire à l’orientation des personnes, locaux mal identifiés dans l’espace public, documentation stigmatisante dans les espaces d’attente, peu d’attention portée à la confidentialité des échanges dans l’organisation physique des espaces d’accueil, disponibilité toujours plus problématique puisque les agents d’accueil doivent bien souvent en parallèle assurer des tâches administratives de plus en plus exigeantes. Au final, les agents d’accueil bricolent, peu font carrière sur ce métier malgré un fort attachement exprimé quant à leurs missions d’accompagnement et de médiation. » [De Jésus, 2016, p. 54-55]

 

« Les enjeux existants s’agissant de l’accueil du public dans nos administrations sont pourtant déterminants et, une fois encore, les droits culturels permettent de les traduire. Ainsi les agents d’accueil exercent un rôle stratégique en matière d’accès à l’institution, ils y accueillent le public, l’invitent à en comprendre le fonctionnement et à se situer dans le paysage institutionnel. Ils assurent une fonction aujourd’hui informelle de clarification et de simplification du langage et des codes administratifs et leur responsabilité est essentielle en particulier en matière d’accès aux droits dans le domaine social : « Les personnes qui viennent jusqu’à nous font déjà un très grand pas, si elles sont mal accueillies c’est foutu, on ne les reverra plus ». [De Jésus, 2016 p. 55]

 

MISE EN ŒUVRE

Reconnaitre le métier d’agent d’accueil, développer formations et réseaux professionnels
  • Agent d’accueil : plus qu’une fonction, une profession, un métier (art.3 – art.6)

– Reconnaître officiellement les agents d’accueil comme des professionnels du travail social ; (N43 – N43a)
– Faire que les agents d’accueil puissent s’approprier leur espace de travail, déployer leurs capacités relationnelles et leurs compétences ; (N43 – N43a)
– Développer des programmes de formation correspondant à l’exigence du métier d’agent d’accueil ; (N40 – N43 – N43a – N58)
– Contribuer à l’amélioration des pratiques d’accueil comme à l’évolution du métier, développer des réseaux et communautés d’acteurs concernés ; (N40 – N43 – N43a – N58)
– Faire que les agents d’accueil puissent devenir formateurs au sein des institutions de formation du travail social et dans le cadre de l’accueil de stagiaires ;
– Développer une politique de ressources humaines reconnaissant les capacités et les compétences requises à l’exercice complexe de ce métier ; (N43-N43a)

  • Créer et pérenniser le poste d’agent d’accueil
Aménager des espaces conviviaux et adaptés aux conditions d’un accueil respectueux des droits des personnes
  • L’accueil : un espace d’échanges et de convivialité animé (art. 4 – art.5)

– Se rendre disponible afin d’assurer et/ou d’organiser un ensemble de services pouvant aller de l’accompagnement dans les démarches administratives à la garde d’enfants le temps du rendez-vous des parents ; (N58 – N68)
– Proposer des animations et moments de convivialité partagés au sein de l’espace d’accueil. Favoriser les échanges entre les personnes qui s’y trouvent ; (N40-N43a-N68)
– Solliciter d’autres acteurs afin de diversifier les formes d’animation et évènements possibles au sein de l’espace d’accueil ; (N68)
– Inviter les personnes accueillies à venir pour autre chose que leur suivi administratif (expositions, débats, conférences etc.) ; (N68)
– Rechercher les éléments qui permettent tant au personnel d’accueil qu’aux personnes accueillies de s’approprier les lieux ; (N43a – N68)
– Développer les possibilités d’échanges au sein de l’espace d’accueil afin de favoriser l’émergence de prises d’initiatives et d’actions collectives impliquant les personnes accueillies ; (N68)
– Contribuer au développement de diverses formes d’actions collectives impliquant les personnes accueillies ; (N68)
– S’appuyer sur les références culturelles portées par les personnes afin de contribuer à enrichir les formes d’animation développées et favoriser l’interconnaissance des personnes ; (N68)
– Créer une banque de données participative sur les ressources que les personnes accueillies et le personnel d’accueil veulent mettre en partage ; (N58)

  • L’accueil : des espaces d’accueil aménagés (art. 3)

– Insonoriser les locaux afin d’améliorer le respect de la confidentialité et l’intimité des personnes ; (N43b)
– Aménager l’espace avec du mobilier favorisant les échanges et améliorant le confort des personnes ; (N43b)
– Développer le matériel adapté aux enfants et à leur soin ; (N43b)
– Faire place aux personnes en situation de handicap ; (N58 – N43b)
– Se saisir des ressources locales pour que l’espace d’accueil puisse porter l’empreinte des liens tissés avec son environnement plutôt que de rechercher l’expression froide d’une neutralité ; (N58 – N68)
– Travailler sur l’image univoque et stigmatisante de l’espace d’accueil que les affiches de prévention des risques (entre autres) finissent par renvoyées aux personnes accueillies ; (N68)
– S’outiller (ex. postes informatiques, bornes interactives) pour permettre aux personnes accueillies de disposer de leur temps d’attente comme elles le souhaitent ; (N43b – N58 – N68)

Assurer les médiations nécessaires à la compréhension réciproque
  • L’accueil : un espace de médiation (art. 3), d’information et d’orientation (art 7) :

– Organiser une présence continue des agents d’accueil pour donner des points de repères aux personnes accueillies et favoriser la connaissance interpersonnelle ;  (N40 – N43a)
– Se rendre disponibles afin d’apaiser l’appréhension des institutions, favoriser leur fréquentation, éviter la sensation éprouvée de déranger ou de s’être trompé de porte ; (N43 – N 43a – N68)
– Gérer le flux des personnes dans l’écoute et la prise en compte de leur singularité et de leur spécificité ; (N43 – N43a – N58 – N68)
– Traduire le fonctionnement et les codes du service public pour que les personnes comprennent où elles se trouvent, ce qu’elles doivent et peuvent y faire ; (N40 – N43 – N43a – N68)
– S’assurer que la communication est possible, développer des compétences en relations interculturelles ; (N40 – N43 – N43a – N58 – N68)
– Trouver la juste distance de l’accueil pour que des liens soient noués sans que l’espace de chacun soit envahi ; (N43a – N68)
– Développer des compétences pour désamorcer les tensions, diminuer le risque d’agressivité et instaurer des conditions favorables aux échanges ; (N43a)
– Présenter les professionnels du service public ainsi que leur rôle ; (N43a – N68)
– Être en capacité de délivrer de multiples informations dans un même espace (démarches administratives, vie institutionnelle, vie locale, ressources du territoire etc.) ; (N43-N43a-N58-N68)
– Développer la transmission orale des informations en plus de l’utilisation des supports afin de favoriser les échanges et de délivrer les explications supplémentaires ; (N40-N43a-N58-N68)
– Collecter, classer et organiser les informations mises à disposition pour les rendre plus accessibles aux personnes accueillies ; (N43a-N58-N68)
– Chercher les ressources informationnelles complémentaires via d’autres services ou administrations ; (N40-N43a-N58-N68)
– Innover et diversifier les supports d’information et de communication, opérer des traductions originales (pictogrammes, schémas, cartographies etc.) ; (N40-N43a-N58-N68)
– Être en capacité d’orienter les personnes vers les services les plus appropriés à leur situation et vers toutes ressources favorisant le développement de leurs propres capacités ; (N43a-N58-N68)

« La fonction d’accueil est une fonction à la fois transversale et spécifique.
Spécifique : La fonction d’accueil a pour enjeu principal de reconnaître chaque personne pour ce qu’elle est, et d’accueillir sa singularité non seulement comme un défi mais comme une ressource à découvrir et déployer. En termes de droits culturels, il s’agit tout d’abord du droit de chacun d’être respecté pour ce qu’il est (art. 3 a), qui conditionne la possibilité pour chacun d’agir, de participer et de contribuer à la vie culturelle et à la société librement (art. 5 et 8). Sans accueil, sans reconnaissance, cette participation est freinée, voire impossible, et une grande partie de ce qui pourrait émerger de la rencontre est gaspillé ou reste, comme la personne, inconnu et inaccessible.
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, l’accueil n’est pas un acte unique, qui ne se déploierait qu’à la première rencontre. C’est plutôt une posture d’ouverture et de disponibilité, une réceptivité qui rend possible l’expression de la personnalité de chacun au moment qui lui semble le plus opportun. Cela implique un souci d’aménager des temps, espaces ou propos propices à l’interconnaissance, invitant à dépasser l’utilité stricte de l‘interaction pour la transformer en rencontre.
Transversale : Bien que la fonction spécifique et les professionnels de l’accueil doivent particulièrement maîtriser cet enjeu et être reconnus pour cette fonction centrale de facilitateurs de liens, la capacité d’accueil de l’autre est importante pour tous, quel que soit leur métier ou fonction. Elle est primordiale pour toute position d’encadrant, afin de valoriser ses collaborateurs et leur permettre de contribuer à la hauteur de ce qu’ils sont, ce qui engage leur motivation en plus de leurs compétences. Elle est centrale à toute interaction avec d’autres, collègues, clients, partenaires, amis, voisins, pour permettre de réelles rencontres, l’échange et le tissage social » [La fonction d’accueil, introduction aux 12 propositions du Nord, 2016]

« Les agents d’accueil jouent un rôle peu reconnu, lié à la réduction des violences symboliques exercées par l’administration. La régulation humaine est en effet souvent nécessaire, d’autant que certains partenaires institutionnels ne sont plus disponibles que sur serveur téléphonique. Ils apportent en outre de la confiance dans les relations institutions bénéficiaires, ils sont d’ailleurs parfois sollicités pour valider ou non la teneur d’une information qu’un usager aura lue ici ou là. Les agents d’accueil de nos institutions constituent donc un relais stratégique entre l’institution et les habitants des territoires, une courroie de transmission, une « ressource » essentielle pour permettre aux habitants de s’orienter, en utilisateur – contribuable – citoyen éclairé, dans l’offre de service public disponible sur leur territoire » [De Jésus, 2016, p. 55]

 

« L’analyse à travers les droits culturels met en évidence la création de richesse qui se joue potentiellement dans la relation entre un agent qui incarne et facilite l’utilisation du service public sur un territoire et des habitants qui vivent une institution éclatée, désincarnée et peu sensible à la nécessité de rendre plus lisibles et plus confortables les parcours administratifs. (…)
L’analyse du métier d’agent d’accueil à travers les droits culturels a en définitive montré la nécessaire évolution de la fonction accueil dans le service public. Il est question de créer un nouveau métier d’agent d’accueil qui assurerait une interface pour les habitants sur les territoires, ouvert sur les autres institutions et autour de qui pourrait se construire un écosystème de service public innovant et agile ! Il s’agit pour l’administration de s’emparer de cette question de l’accueil du public pour en faire un socle d’innovation ascendante et affirmer une relation au service public qui garantisse la lisibilité de son action et engage sa capacité d’adaptation. Il y a derrière ces nécessaires transformations un enjeu politique fort en termes de confiance des citoyens dans l’action publique » [De Jésus, 2016, p.55]

CAS D’ÉCOLE

 

Accueil en consultation infantile en UTPAS – N40

Observateur(s) : Patricia Levecq (contact)

Institution : Conseil Départemental du Nord – UTPAS

Résumé : La consultation infantile est une mission dont le cadre est l’ordonnance du 2.11.1945. La PMI a pour objectif à cette époque de lutter contre la mortalité infantile. Suite aux lois de décentralisation, il est créé un service départemental de PMI. La consultation infantile concerne les enfants âgés de 0 à 6 ans.

Ce cas d’école tente l’analyse au regard des droits culturels des carences multiples dans les pratiques d’accueil en consultation infantile.

Les conditions d’accueil en UTPAS – N43, N43a, N43b

Observateur(s) : Marie-Odile Allioux, Sylvie Pierlot, Véronique Baron (contact)

Institution : Conseil Départemental du Nord – UTPAS

Résumé : Cette grappe de cas d’école est basée sur la description précise des conditions de travail des acteurs en charge de l’accueil dans un UTPAS ainsi que leur rôle dans la qualité des relations avec les personnes accueillies comme avec les autres membres du personnel. L’organisation des espaces, les conditions matérielles et les outils à disposition pour bien accueillir les personnes sont passés au crible pour en analyser les conséquences en termes d’effectivité des droits culturels des personnes.

Ces cas d’école permettent l’analyse de l’impact des conditions de travail d’un agent d’accueil sur l’accueil des personnes dans les institutions du type UTPAS.

La prise en compte de la relation parents/enfants à l'accueil en UTPAS au regard des droits culturels – N58

Observateur(s) : Patricia Neveu, Régine Six (contact)

Institution : Conseil Départemental – UTPAS

Résumé : Les relations parents/enfants ne sont pas suffisamment prises en compte dans l’accueil des familles au sein des UTPAS. Ni les conditions matérielles ni les activités proposées ne semblent favoriser la prise en compte de l’importance de ces relations durant l’attente des personnes au sein des espaces d’accueil ou comme une modalité de l’accompagnement social des personnes.

Ce cas tente une analyse des conditions qui favoriseraient l’évolution des représentations de l’UTPAS par les personnes accueillies.

L’accueil en salle d’attente en UTPAS au sein du département du Nord – N68

Observateur(s) : Lydie Podvin, Sylvie Pierlot, Patricia Neveu, Régine Six (contact)

Institution : Conseil Départemental du Nord – UTPAS

Résumé : Ce cas d’école repose les éléments qui servent de référentiel pour définir le cadre de l’accueil et de l’animation de l’espace d’accueil en UTPAS. Une fois posé, la description porte sur la configuration des espaces aménagés pour un accueil polyvalent ainsi que sur les pratiques d’accueil et d’animation exercées en fonction des ressources disponibles. Le projet de service apparaît alors comme un outil d’adaptation des pratiques aux réalités locales pour une réflexion participative des différentes parties prenantes que sont les professionnels, les partenaires et les habitants usagers des services.

En énonçant la disparité des pratiques et configurations des espaces d’un UT à l’autre, ce cas d’école permet d’analyser les marges de manœuvre que les acteurs peuvent avoir pour se saisir de l’importance de l’accueil pour favoriser l’effectivité des droits fondamentaux des personnes au sein des institutions.

ANALYSE D’UNE PRATIQUE

Récit du cas d'école 43a

Le pré accueil physique : l’enjeu de la qualité de l’accueil par un agent d’accueil

« L’agent d’accueil assure la fonction de 1er accueil pour toute personne se présentant à l’UTPAS, quelque soit le service concerné de l’UTPAS ou pour l’orientation vers d’autres services extérieurs à l’UTPAS. Le poste de l’agent d’accueil et d’animation n’est pas pérennisé (c’est un contrat emploi jeune). L’agent est titularisé sur cette fonction d’accueil et d’animation mais le poste disparaitra si l’agent quitte l’UTPAS. C’est un poste atypique en UTPAS. Il n’y en a pas dans chaque UTPAS car le poste d’agent d’accueil, en tant que tel n’existe pas. Habituellement, ce sont les secrétaires médico-sociales qui assurent cette fonction. Auparavant dans l’UTPAS les 9 secrétaires médico-sociales se répartissaient 6 tranches horaires d’accueil par jour et ne pouvaient apporter aux usagers les bénéfices cités ci-dessous.

Toute personne qui se présente à l’accueil est reçue en 1ère instance par l’adjoint d’animation (Cat. C) qui fait fonction d’agent d’accueil. Arrivée par le dispositif des emplois jeunes, elle est maintenant titulaire de son poste.

Depuis que cette fonction existe, nous avons constaté de nettes améliorations :
– Elle est un point de repère pour les usagers qui l’ont bien identifiée
– Elle assure un accueil personnalisé car elle connait bien les personnes qui viennent régulièrement. Cela instaure une relation de confiance entre la personne reçue et l’institution (image positive de l’institution). De plus cela peut diminuer les risques d’agressivité.
– Elle adapte sa posture et comportement en fonction des personnes, en concertation avec l’équipe, notamment avec des personnes avec des troubles psychiques
– Sa présence évite aux personnes de réexpliquer leur situation à chaque venue à l’UT. Ils se sentent ainsi reconnus et respectés et trouvent une écoute chaleureuse
– Elle assure un rôle de relais entre l’usager et le travailleur social
– Elle assure divers services pendant la permanence du travailleur social (téléchargement de formulaires, recherche de documentation pour toute orientation etc.), ce qui permet aux assistantes sociales de se concentrer sur leur entretien.

L’agent d’accueil est dans un espace d’accueil, de 4 M2 environ, vitré avec une porte qui reste ouverte. Elle se trouve derrière un comptoir. Ce sas est contigu à la pièce de la standardiste qui reste toujours ouverte. De ce fait, toutes les informations, paroles, bruits circulent entre le secrétariat et l’accueil et vice versa.

Article 3a
  • L’agent d’accueil reçoit toute personne qui se présente à l’UTPAS sans discrimination. Le respect de la confidentialité n’est pas assuré car les portes restent ouvertes entre les différents locaux. Pour autant, fermer les portes n’est pas une solution pour des raisons de sécurité et le sentiment d’isolement qu’éprouverait l’agent d’accueil.
[Art. 3a – L’analyse montre que les conditions matérielles impactent sur le respect de l’identité des personnes accueillies (confidentialité) et le respect de l’identité de l’agent d’accueil (conditions de travail insuffisantes)]

Article 3b
  • L’agent d’accueil n’a pas de formation spécifique à l’interculturalité. L’agent d’accueil se heurte bien souvent au barrage de la langue (parler, écrire, lire). Il serait nécessaire que les travailleurs médico sociaux puissent échanger avec l’agent d’accueil sur certaines situations et que les agents d’accueil soient partie-prenante des réunions de service.
[Art. 3b – l’analyse montre que la diversité des personnes susceptibles d’être accueillies dans les institutions est niée. Les agents d’accueil peuvent être démunis dans leur rôle d’interface et de médiation entre personnes accueillies et collègues de travail. Cela interroge sur le développement de formation dans ce domaine – Art. 6]

Article 4
  • Puisque le poste d’agent d’accueil en UTPAS n’existe pas en tant que tel, la personne en poste ne peut se référer à une « communauté de métier d’agent d’accueil ». Concernant l’accueil, nous ne pouvons pas dire que l’UTPAS fasse réellement « communauté ». Cela pourrait être le cas dans le cadre du travail engagé dans la construction du projet de service.
[Art. 4 – L’analyse montre qu’être agent d’accueil en UTPAS n’est pas considéré comme un métier. Cela montre également que l’accueil est un « impensé » du travail social et peut-être plus largement des institutions recevant du public. Cela a des incidences sur le développement de coopération pour assurer un accueil qui soit respectueux des droits fondamentaux des personnes – Art. 8]

Article 7
  • L’espace d’accueil est bien souvent considéré comme un « guichet » d’informations multiples. Pourtant l’organisation et la gestion des informations circulant dans cet espace sont complexes. L’agent d’accueil reçoit la personne, l’écoute, l’informe, voir lui donne des documents, des dossiers administratifs et les réoriente si nécessaire. Il centralise un grand nombre d’informations mais certaines sont peu exploitées (informations données par les travailleurs sociaux, informations sur la vie culturelle locale etc.). Personne n’est identifié pour coordonner la collecte d’information et en organiser la diffusion. Toutes ces informations sont in fine peu relayées auprès du public. L’agent d’accueil peut également accompagner les personnes accueillies à faire leur propre recherche mais les outils à disposition ne sont pas forcément adéquats (ex. manque de poste informatique, de brochures, de traductions etc.)
[Art 7 – L’Analyse montre que les conditions mises en œuvre ne sont pas optimales pour favoriser l’effectivité du droit à l’information. Le droit de participer à la vie culturelle semble pourtant conditionner le droit à l’information – Art. 5]
Conclusion

Les conditions matérielles et humaines ont des conséquences indéniables sur la qualité de l’accueil et plus largement sur tout le fonctionnement des services d’une institution. Il apparaît nécessaire de nourrir l’élaboration du projet de service de l’UTPAS sur le thème de l’accueil afin de proposer d’y intégrer des améliorations au regard des droits culturels. Un des points à défendre semble être celui de la pérennisation des postes d’agent d’accueil et d’animation dans les UTPAS. En améliorant l’accueil en UTPAS, les personnes viendront plus facilement évoquer les problématiques sensibles : cela peut éviter l’isolement social et la dégradation des situations.

RESSOURCES

  • « Du droit à la culture aux droits culturels. Une première année d’observation et d’évaluation des politiques publiques départementales au regard des droits culturels », Publication Paideia, 2013.
  • « Itinéraires. Du droits à la culture aux droits culturels, un enjeu de démocratie », Publication Paideia, 2015.
  • « Ouvertures de chantiers, développer les droits culturels dans le champ du social, la lecture publique et le numérique, les patrimoines, mémoires et paysages, l’éducation et la jeunesse », Publication Paideia, 2016.
  • Berne C. et L’herminier R., « Le collège du futur en Ardèche », in Ouvertures de chantiers, Publication Paideia, 2016, p.106
  • De Jésus A., « Des agents d’accueil « facilitateurs de territoire » », in Ouvertures de chantiers, Publication Paideia, 2016, p. 54.
  • Derrida J., « Une hospitalité à l’infini », in Mohammed Seffahi (ss la dir. de), Autour de Jacques Derrida, De l’hospitalité, Genouilleux, Vénissieux, La Passe du vent, 2001, p. 173.
  • Fassin D., La Raison humanitaire, Paris, Gallimard/ Le Seuil, 2010, p.11
  • Le Blanc G., « Politiques de l’hospitalité », Cités 2011/2 (n° 46), p. 87-97.
  • L’Herminier R., « Une administration de citoyens », in Itinéraires, Publication Paideia, 2015, p.14.
  • Thévenet R., « Immersion d’aujourd’hui dans le collège de demain », in Ouvertures de chantiers, Publication Paideia, 2016, p. 107
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